Tour Martello 1

Les tours Martello constituent des ouvrages permanents de fortification construits en pierres. À Québec, c’est face à la menace américaine que le gouverneur Craig autorise, sans attendre l’avis de Londres, la construction de quatre tours de ce type sur le promontoire de Québec, dont deux sont situées sur les plaines d’Abraham (tours 1 et 2). Débutées en 1808, les tours 1, 2 et 3 seront complétées en 1810 alors que la quatrième le sera deux ans plus tard. 

Vue extérieure de la Tour Martello 1 sur les plaines d'Abraham, illustrant sa structure de fortification en pierre.

À propos

Les tours Martello constituent des ouvrages permanents de fortification construits en pierres. Utilisées depuis plusieurs siècles en Méditerranée pour notamment combattre la piraterie, elles sont devenues très populaires en 1794 auprès des Britanniques après qu’une de ces constructions, située au cap Mortella en Corse, ait tenu en échec pendant deux jours deux vaisseaux de la Royal Navy. Impressionnés par son efficacité, les Britanniques décidèrent d’en construire le long des côtes anglaises pour défendre l’île contre la menace française. En 1808, on en comptait 73.

Ce type d’ouvrages a aussi été utilisé en Amérique du Nord pour défendre les colonies. Au total, 17 tours Martello ont été construites au Canada au 19e siècle: Halifax, Québec, Kingston, Saint-Jean (N.B). À Québec, c’est face à la menace américaine que le gouverneur Craig autorise, sans attendre l’avis de Londres, la construction de quatre tours de ce type sur le promontoire de Québec, dont deux sont situées sur les plaines d’Abraham (tours 1 et 2). Débutées en 1808, les tours 1, 2 et 3 seront complétées en 1810 alors que la quatrième le sera deux ans plus tard. Fonctionnelles lors de la guerre 1812-1814, elles n’ont toutefois pas été mises à l’épreuve puisque Québec n’a jamais été attaquée durant ce conflit.

Tour Martello 1

S'y rendre

Architecture

Grâce à leur architecture propre, les tours Martello sont peu coûteuses à construire et faciles à défendre. Elles sont disposées à peu près parallèlement à l’enceinte sur toute la largeur du promontoire et se protègent mutuellement. La structure de la tour est particulière. Le mur ouest, qui fait face à l’ennemi, est très épais alors que le mur est, plus mince, peut facilement être détruit par les canons de la ville au cas où la tour serait prise par l’ennemi. Les deux tours du centre (2 et 3) et celles situées aux deux extrémités (1 et 4), devaient abriter respectivement une garnison d’à peu près 20 et 12 hommes. Ces garnisons devaient prévoir leur subsistance pour une période d’environ un mois, soit jusqu’à leur relève.

Visite d'une tour Martello
Entrée de la tour

L’unique accès à la tour est situé à l’étage et est orienté vers l’est, c’est-à-dire vers l’enceinte. L’échelle, une fois tiré à l’intérieur, rendait la tour inaccessible à l’ennemi. Il pouvait y avoir un crochet ou un palan au-dessus de la porte extérieure pour entrer et sortir les objets lourds.

Premier étage : la caserne

À l’origine, les planchers étaient faits de bois (probablement du chêne) que l’on laissait au naturel ou que l’on peignait en gris. Les murs étaient soit sur la pierre, soit blanchis à la chaux (mélange de chaux, d’eau et de vinaigre). Ce revêtement possédait la double propriété d’éclairer la pièce et de la désinfecter. La caserne constituait la pièce principale de la tour. Les soldats y dormaient, y mangeaient et y passaient leur temps libre. En entrant, ceux-ci déposaient leurs fusils sur un support en bois aménagé autour de la colonne centrale. Des lampes à huile, accrochées aux murs, éclairaient les lieux.

 

La tour ne possédait pas de latrines ni de salle d’ablutions: l’hygiène personnelle laissait à désirer. Les soldats utilisaient des pots de chambre dont la vidange quotidienne constituait une corvée.

 

La tour était aussi dotée d’un foyer qui servait à chauffer, à éclairer et à cuire les aliments. Les accessoires, fournis par le régiment, se composaient presque essentiellement d’une grande marmite suspendue à la crémaillère et d’une louche de service. Une longue table et deux bancs servaient aux repas et aux jeux. Les soldats devaient fournir leur couvert composé généralement d’une assiette, d’une tasse, d’une cuillère et d’un couteau.

 

Des couchettes en bois à deux étages étaient aménagées contre le mur ouest. La literie, très modeste et fournie par le régiment, comprenait une paillasse, changeable chaque année, et une couverture de laine grise.

 

À l’origine, l’accès au rez-de-chaussée se trouvait à mi-chemin entre la colonne centrale et le foyer. Une trappe en bois se refermait sur un escalier abrupt, ce qui permettait de récupérer l’espace. Un palan était suspendu au gros crochet de fer fixé au plafond pour hisser les objets lourds de l’extérieur vers l’intérieur de la tour et pour les descendre à l’étage inférieur qui servait notamment d’entrepôt.

 

L’étage de la caserne disposait également d’embrasures à canon. L’une pointée vers le nord, l’autre vers le sud et toutes deux installées dans des embrasures, les caronades de calibre 9 protégeaient l’espace entre les tours.

La voûte et les murs

La forme voûtée du plafond ajoute à la solidité de la structure: les joints ébranlés à la suite d’un bombardement se resserraient et offraient ainsi aux pierres une meilleure prise. Pour obtenir une forme voûtée, on construisait d’abord une armature en bois sur laquelle on déposait les pierres (grès, calcaire ou brique selon le cas) et mortier. Ce dernier était composé de chaux, de sable et d’eau. Lorsque le mortier était sec, on enlevait l’armature en bois. Quant à la colonne centrale, elle supporte toute la structure de la tour. Son centre est rempli de débris de pierre et de mortier.

 

Les murs de la tour possèdent également des caractéristiques propres à ce type de construction. D’une part, le mur ouest, qui en cas d’attaque aurait fait face au tir ennemi, est très épais et donc très résistant. D’autre part, le mur est, du côté de la ville, est beaucoup plus mince. Cette faiblesse offrait la possibilité de détruire la tour à partir de l’enceinte en cas de capture par l’ennemi. Quant aux trous pratiqués dans le mur ouest, ils assuraient l’aération de l’étage. Ils sont dits en «chicane», c’est-à-dire qu’ils se rejoignent à l’arrière et montent à l’intérieur du mur.

L’accès à la plate-forme

L’escalier était conçu de façon à ce qu’en cas de poursuite à l’intérieur de la tour par l’ennemi, l’axe autour duquel monte l’escalier protège le défenseur (habituellement droitier) par son renflement alors que ce même renflement aurait obligé l’ennemi à se découvrir pour tirer. En montant l’escalier vers la plate-forme, on remarque également les deux meurtrières. Celles-ci n’offrent qu’une petite ouverture de l’extérieur, mais s’élargissent à l’intérieur pour donner au tireur un grand angle de visé tout en le protégeant des projectiles ennemis.

Plate-forme

Au moins 1,8 mètre* de brique sépare l’étage principal du toit qui supporte la plate-forme. Même si cette dernière fut conçue pour recevoir cinq pièces d’artillerie, trois seulement y furent installés**.

 

* Les dimensions sont réduites dans le cas des tours 1 et 4.

 

** Les plates-formes des tours 1 et 4 étaient conçues pour recevoir trois pièces d’artillerie, mais une seule y fut installée.

Le rez-de-chaussée

Le mur ouest à cet étage est à son plus épais, c’est-à-dire environ 5 mètres (les dimensions sont réduites dans le cas des tours 1 et 4). Comme à l’étage supérieur, le plancher était à l’origine en bois. Les soldats y circulaient avec prudence et portaient des chaussures à semelles cousues ou à chevilles de bois afin d’éviter la formation d’étincelles.

 

On trouvait au rez-de-chaussée le magasin. Cette grande pièce servait à l’entreposage des vivres. La garnison était en poste pour une lune et devait prévoir tout ce dont elle avait besoin jusqu’à sa relève. Des barils contenaient du bœuf ou du porc salé, des pois séchés, de la farine, de l’huile à lampe, etc.

 

Comme à l’étage de la caserne, on remarque au rez-de-chaussée des ouvertures dans les murs. Situées au ras du sol et disposées à intervalles réguliers, ces trous d’aération assuraient la circulation de l’aire dans la tour. La faiblesse produite par ces ouvertures était compensée par des arcs qui répartissent le poids sur toute la structure.

 

Le tambour et la poudrière se trouvent aussi à cet étage. Le premier est une pièce où l’on préparait les charges de poudre pour différents besoins(gargousses, cartouches). Avant d’exécuter ces tâches, les soldats s’assuraient que les portes étaient très bien fermées pour éviter toute fuite et ainsi réduire les risques d’explosion. La poudrière, comme son nom l’indique, servait quant à elle à conserver la poudre. Elle pouvait contenir jusqu’à 150 barils (75 barils pour les tours 1 et 4) de 75 livres (34 kg) chacun. Les trous d’aération, nombreux dans cette pièce, permettaient de la garder au sec. Comme pour la structure principale de la tour, la forme voûtée du plafond protégeait la poudrière d’un effondrement éventuel de l’étage supérieur.  

 

Enfin, cinq réservoirs d’eau (trois seulement pour les tours 1 et 4) ont été creusés dans le sous-sol de la tour. L’eau de pluie, recueillie sur le toit par des rigoles, était acheminée par des conduits pratiqués dans la structure de pierre jusqu’aux réservoirs. Cette eau ne devait servir qu’en cas de siège. Pour les besoins quotidiens, des puits se trouvaient à proximité.